La solitude est souvent un recul devant les manifestations de l'atrocité, la sévérité, la trahison. C'est une fuite en avant à la rencontre des univers peuplés de rêves, d'espérances. La solitude c'est la terre des revanches par excellence. On évince les humains indésirables, on règne majestueusement, on gouverne sans partage, on protége notre orgueil du mépris, on se prémunit des regards malicieux et de la désinvolture des autres.
C'est un oasis bien ornementé de verdure, planté au milieu de ce désert qui nous assiège et étouffe. C'est là où la sève du bonheur coule en abondance, la quiétude y règne, alors que l'aridité et la stérilité continuent à sévir ailleurs.
La solitude sous cet angle n'est tentée que par des gens sensibles, fragiles, subtiles, rêveurs. C'est le refuge d'une race désarmée, soucieuse, affairée. C'est une catharsis de la souillure quotidienne.
Je m'adresse aujourd'hui à ces recroquevillés qui souffrent silencieusement. La solitude ne doit pas être le synonyme du mépris, du rejet catégorique des autres. Elle doit être considérée plutôt comme un recueillement et non un recroquevillement. C'est une illumination et non un engouffrement. C'est une élévation et non une décadence. C'est une recherche du sublime et non une reproduction de l'amertume. C'est une étape provisoire et non la consécration d'une distanciation éternelle. C'est un exercice d'initiation et de réjouissance et non une épreuve répugnante d'auto- flagellation.
Il faut rechercher une solitude bienveillante qui conduit vers la vie plutôt qu'à la consumation et l'auto- destruction. On franchit le seuil de solitude chargé d'incertitudes et d'indécisions et on doit échapper à ses ténèbres assez déterminé et mieux outillé.
Bref, la solitude est une lucarne qui donne sur la vie et ses sagesses, la passerelle qui emporte vers la purification et la sublimation.
" Cette clôture à l'intérieur de laquelle on ne laisse entrer personne ni rien qui abîme et racornisse. Etre une présence, une présence réelle, un vrai silence qui écoute plutôt qu'un miroir qui reflète ou un abîme qui engloutit " ( Colette Nys-Mazure, Edition Desclée Brouwer, Célébration du quotidien, 1997, p 117).